À l’origine de l’initiative Closing Worlds, lancée en 2017, il y avait la volonté de travailler deux dimensions qui nous semblaient alors négligées : l’héritage et la fermeture. L’« héritage » désigne tout ce à quoi nous sommes attachés (infrastructures, modèles économiques…) alors que le constat s’impose, dans notre temps d’Anthropocène, de l’impossibilité de maintenir de telles relations de dépendance de manière pérenne. Il s’agissait donc de devancer cette impossibilité de maintenir ces liens dans le temps long, sous peine d’aggraver les catastrophes à venir. Or, un art ou une politique du détachement, du renoncement, de la fermeture, font très largement défaut aujourd’hui.
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Ce programme que nous avons exposé dans un récent ouvrage, Héritage et Fermeture. Une écologie du démantèlement(Divergences, 2021), nous nous proposons ici de l’illustrer à travers deux cas concrets, deux enquêtes où se lisent les enjeux de ce que nous nommons la « redirection écologique » : ce concept autour duquel se construit l’initiative Closing Worlds renvoie à l’idée que les paradigmes actuels, comme le « développement durable », ne permettent plus de penser la nouvelle situation écologique et climatique, dont l’urgence exige un alignement sans délai des organisations et entreprises vis-à-vis des limites planétaires. Ces deux enquêtes posent l’enjeu des « communs », ces biens et situations que nous avons en partage, ainsi que de la « cosmologie » des élus territoriaux révélée par les équipements sportifs, lesquels démontrent la nécessité de faire émerger des métriques destinées à nourrir une « nouvelle science de l’arbitrage public ».
Désaffecter et réaffecter : l’arrêt de la construction neuve
Avec le concours de l’agence Arp Astrance, deux étudiants de notre master « Strategy & Design for the Anthropocene » (ESC Clermont – Strate École de Design Lyon), Philippe Bouteyre et William Van Gelderen Plannier, enquêtent depuis la fin de l’année 2020 sur le bien-fondé d’un arrêt de la construction neuve en Île-de-France et comment, le cas échéant, y parvenir concrètement. Le point de départ de cette enquête est simple : le secteur du bâtiment a des impacts très importants en termes d’émission de CO2 (ou équivalents) et d’artificialisation des sols. De surcroît, « 90 % du parc immobilier de 2050 existe déjà et […] 50 % du parc existant a été construit avant la mise en place de réglementations thermiques, c’est là que semble clairement reposer l’enjeu : […] se focaliser sur des activités de rénovation, d’adaptation et d’optimisation de l’utilisation des bâtiments ». Parmi les pistes esquissées pour donner corps à cette redirection du secteur de la construction (du point de vue des aménageurs, des architectes, des promoteurs et de l’ensemble des acteurs de l’immobilier et des habitants), nous étudions des régimes juridiques alternatifs à la propriété privée restreignant la spéculation, tels que les coopératives foncières ou encore les coopératives d’habitants. C’est ce point que nous voudrions approfondir ici à travers les questions que poserait une telle redirection.
« Il s’agit de permettre à des publics de se mêler de ce qui ne les regarde pas, quand bien même aucun cadre ne le prévoirait. »
Pourquoi, tout d’abord, repenser la propriété privée en matière de foncier ? L’arrêt de la construction neuve pose des questions inédites. Peut-on, par exemple, maintenir le même rapport au « marché de l’immobilier » si l’on envisage la construction comme une possibilité exceptionnelle – dérogatoire, même ? Quid de la capacité à changer de logement, limitée aujourd’hui par des facteurs sociaux et économiques, mais qui pourrait alors se généraliser le cas échéant ? Et quid également, pour les personnes attachées désormais de manière plus rigide encore qu’auparavant à leur logement, si celui-ci s’avère par exemple insalubre ? Comment faire de leur situation un enjeu collectif et non plus individuel ?
D’autre part, pourra-t-on encore légitimer le statut et la relation qu’entretiennent aujourd’hui propriétaires (ou copropriétaires, sachant, par ailleurs, que la propriété en matière de foncier est d’ores et déjà, très souvent, une copropriété) et locataires dans ces conditions, sans risque de voir les seconds excessivement inféodés aux premiers ? À l’intérieur même du cadre de la propriété privée, ne faudrait-il pas revoir ce système de « rente » et insister davantage sur la responsabilité à l’égard de biens désormais investis d’une importance réaffirmée à l’aune de leur vocation : durer pour mieux loger nos concitoyens et concitoyennes face à des impératifs de plus en plus tendus en matière de répartition des sols, de maintien ou d’expansion des surfaces agricoles – sans parler des mécanismes de capture de CO2 sur lesquels compte le Giec lui-même, et qui ajoutent à cette compétition pour les surfaces ?
« Les infrastructures sportives résultent la plupart du temps d’erreurs de conception ou de design. »
Autrement dit, il s’agit sans doute d’accentuer la dimension patrimoniale de la propriété et, corrélativement, de « désintensifier » son assimilation de plus en plus grande à un capital chaque jour plus fluide et financiarisé, appelé à circuler et à passer de main en main, subvertissant au passage la dichotomie entre biens meubles et biens immeubles. C’est justement cette opposition entre « patrimoine » et « capital » que thématise Pierre Caye dans plusieurs ouvrages, dont le récent Durer. Au point de départ de sa réflexion sur la patrimonialisation, l’accent est mis sur « l’affectation », à savoir la destination d’une chose ou le but qu’elle poursuit, à rebours d’une vision volontariste caractérisée par le bon vouloir – ou les caprices – d’un propriétaire exerçant souverainement ses droits (usus, fructus et abusus), sur une chose dénuée de contenu propre et incapable d’opposer ses intérêts. Si l’affectation limite les droits du propriétaire afin de satisfaire une finalité attachée à la chose possédée, s’affirme ainsi une forme d’autonomie vis-à-vis de ce dernier. Cette autonomisation par rapport au détenteur, dont elle limite et, plus encore, oriente l’action, c’est « l’autonomie patrimoniale », qui élève et protège le but à réaliser. Un but ou un intérêt collectif auquel répond bien l’impératif de loger sans dégrader les conditions d’habitabilité – on ne saurait guère en trouver de plus importants.
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À la figure du locataire, il faudrait donc substituer celle du « titulaire patrimonial », à l’égard duquel le « titulaire juridique » (le propriétaire au sens ordinaire du terme) remplirait des obligations au titre d’une « universalité patrimoniale », d’un but commun au service d’une collectivité affrontant les enjeux de l’Anthropocène. Cette réflexion nous renvoie évidemment à la question des communs et de ce qu’Alexandre Monnin a appelé des « communs négatifs ». Avec cette question, nous nous situons au cœur de ce qu’entend saisir la notion d’« héritage » (« patrimoine » est d’ailleurs traduit en anglais par le mot heritage). À plus forte raison s’agissant du droit, dont, on le verra, il faut hériter pour articuler concrètement ces enjeux de patrimonialisation.
Et cette question est particulièrement complexe concernant par exemple des communautés autochtones qui héritent du droit du colonisateur pour protéger leur « patrimoine » ancestral. Si la patrimonialisation fait ressortir l’idée d’intérêt ou de valeur « intrinsèque », il faut cependant dépasser une apparente contradiction. Il ne saurait y avoir d’intérêt ou de valeur sans « valuation » préalable. Par le mot « valuation », il faut entendre le fait d’enquêter collectivement sur ce à quoi l’on tient et qui nous tient. Y compris, en matière de communs négatifs, sur des réalités problématiques telles que, en l’occurrence, la propriété en tant qu’elle est indexée sur le capital ou qu’elle devient un simple « actif » (asset en anglais). Loin de s’y opposer, la valeur intrinsèque nécessite la valuation. Elle en résulte même, et ne s’appréhende qu’à partir de pratiques et d’enquêtes.
À lire Pierre Caye, les communs manqueraient quelque peu de densité sur le plan juridique, comparés à la notion de patrimoine. Dès lors, pourquoi penser la propriété privée, assimilée à un capital, à la manière d’un commun négatif (et non d’un patrimoine négatif par exemple) ? La réponse est simple : précisément parce que les communs négatifs sont dépourvus de traduction juridique a priori. Autant les communs entendent subvertir le cadre institué de la propriété (privée ou publique) et s’y réfèrent ainsi en permanence, autant il n’y a pas de contrepoint juridique s’agissant des communs négatifs. Il s’agit donc d’instituer une dimension qui ne l’est pas encore. De permettre à des publics de se mêler de ce qui ne les regarde pas (à commencer par le devenir de la propriété privée par exemple), quand bien même aucun cadre ne le prévoirait. D’étendre, en d’autres termes, la portée de l’action démocratique. Rapporté à la typologie des communs négatifs esquissée dans Héritage et Fermeture, le patrimoine incarnerait « ce avec quoi il faut vivre désormais ».
Ces réalités qui menacent notre survie et qu’il convient de ne plus traiter comme des actifs, mais au contraire d’immobiliser et de mettre à distance. En revanche, on ne voit quel statut juridique existant embrasserait à la fois les communs négatifs susceptibles d’être fermés et ceux nécessitant de nouvelles relations diplomatiques. Comment instituer des collectifs légitimés à s’emparer de ces questions ? Et quel statut pour ces réalités tantôt en sursis, dont il faut diminuer l’existence, tantôt qui exigent une nouvelle diplomatie, à l’instar des espèces invasives, virus ou autres bactéries (notons que le mot « diplomatie » le dit bien : il y a là un statut à élaborer) ? La question est ouverte.
Enfin, revenons à notre point de départ : il faut hériter du droit pour hériter des communs négatifs. Hériter, par conséquent, des communs négatifs du droit lui-même – ce qui constitue l’un des implicites de la réflexion de Pierre Caye : hériter pour mieux réaffecter la propriété du capital vers le patrimoine, pour apprendre à renoncer ou à « fermer » les conceptions subjectivistes ou volontaristes de la propriété privée, ou encore les principes de l’analyse économique du droit, qui inféodent ce dernier à la performance économique. Pierre Caye met d’ailleurs en cause, à cet égard, l’Union européenne, qui en a adopté la logique, comme l’ont bien montré les travaux d’Alain Supiot. On le voit, les enquêtes portent sur des communs négatifs de tailles variables. Arrêter son regard sur l’un plutôt que sur l’autre relève d’un enjeu proprement stratégique.
Le syndrome du stade vide : la redirection écologique d’une politique sportive
Les équipements sportifs sont souvent les infrastructures les plus problématiques d’un point de vue écologique. Les territoires disposent de stades, de gymnases, de piscines, de terrains de football, etc., souvent très énergivores ou consommateurs de flux (eau, gaz pour le chauffage...). Les chiffres sont éloquents et les diagnostics assez clairs : si les territoires veulent tenir leurs engagements climatiques, il va falloir, en priorité, reconfigurer complètement leurs politiques sportives. C’est l’un des résultats centraux de notre enquête : en nous penchant sur la transition écologique des villes, municipalités ou régions, nous nous attendions à entendre parler de résilience alimentaire, de mobilités douces, etc. Eh bien, non : le gros du morceau, si l’on peut dire, est… la politique sportive. En effet, la plupart des équipements ont été conçus et bâtis il y a trente ou quarante ans ; ils sont aujourd’hui vétustes. Les territoires ont un réflexe « ingénieurial » face à cette situation : selon les élus, il suffirait de « verdir » l’équipement sportif concerné, d’améliorer son isolation, de changer les systèmes de chauffage, de pelouse, etc.
« Les équipements sportifs sont souvent les infrastructures les plus problématiques d’un point de vue écologique. »
Cette approche est avant tout tactique, incrémentale, mais surtout pas stratégique. Que veut dire alors « faire atterrir » une politique publique sportive ? Que veut dire penser une stratégie sportive à la hauteur de la situation climatique et écologique ? Cela fait plusieurs années que nous enquêtons sur des élus locaux (municipaux, métropolitains, départementaux et régionaux) et les côtoyons, ainsi que sur leurs manières de penser, de domestiquer l’urgence climatique et écologique. C’est une population finalement assez « compacte », malgré les positionnements politiques en présence. Il est d’ailleurs surprenant de noter la convergence entre les manières de parler d’un élu local d’une grande métropole urbaine et d’un élu communal issu d’un monde paysan en tension, ou encore d’un élu du Parti communiste français (PCF) et d’un autre inspiré par le monde des start-up : tous vont invoquer des concepts tels que l’attractivité, l’innovation, la compétitivité, le développement durable – et, plus récemment, la résilience – pour justifier des investissements publics dans leurs territoires.
Ces concepts sont essentiellement apolitiques, c’est-à-dire qu’ils charrient avec eux une forte capacité à neutraliser ou offusquer la nécessité d’arbitrages politiques clairs et lisibles. Ces élus, dans leur grande majorité, n’ont pas seulement besoin de communiquer avec leurs administrés, ils ont aussi besoin d’exhiber de grands horizons projectifs leur permettant de démontrer qu’ils savent où ils vont. L’élu territorial a donc un monde bien à lui ; il le nomme, le pense, l’articule, le projette selon une logique (ce que les anthropologues pourraient appeler une « cosmologie ») bien spécifique et qui s’est largement stabilisée depuis une trentaine d’années.
À travers nos enquêtes, nous avons essayé de comprendre ce monde des élus territoriaux au regard des enjeux climatiques et écologiques, afin de pouvoir faire éclore une anthropologie des élus locaux, une description de leur manière de penser le monde alors que le monde lui-même subit des transformations écologiques critiques. Au fil de ce travail de description, nous avons constaté que le concept d’« attracteur », proposé par Bruno Latour, pouvait revêtir une pertinence appropriée pour nommer la manière dont les élus locaux pensent le projet public, et en particulier ses justifications. Un des régimes de justification les plus utilisés est celui de l’attractivité. Un territoire moderne se doit d’être attractif : attirer d’abord et avant tout des personnes (habitants, touristes) mais aussi des investissements, des projets, des entreprises… Ce concept constitue donc l’un des attracteurs les plus puissants de la politique publique locale. Autre « attracteur » important qui justifie souvent les politiques publiques ou les investissements : la demande sociale. Le maire socialiste d’une ville moyenne française nous expliquait la chose ainsi : « La demande sociale, c’est ce qui dirige mon action. Je dois répondre à cette demande sociale par une politique publique. Le stade, par exemple, est clairement une demande sociale. On ne peut pas l’ignorer. Sinon, je ne fais pas mon boulot, je ne suis pas en train d’honorer ma responsabilité. »
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Les équipements sportifs aujourd’hui sont donc annexés à ces attracteurs qui, pour la plupart, n’incorporent aucunement des aspects écologiques ou climatiques, ou seulement de façon marginale. Ces attracteurs sont avant tout les marqueurs d’une politique publique guidée par les économies d’échelle, mais surtout par la réponse à une demande sociale et un besoin d’attractivité, et non par des enjeux d’habitabilité, par exemple. Mais le problème de l’attracteur « demande sociale » est qu’il repose sur une politique sportive uniquement basée sur la pratique. Une communauté de praticiens se structure, monte en compétence, s’organise et formalise une demande pour répondre à son besoin d’équipement.
Dans nos enquêtes, on nous parle ainsi très souvent de nouvelles communautés de pratiques sportives – comme le baseball, le football américain ou le paddle – qui, toutes, commencent à se structurer et à donner forme à cette fameuse demande sociale. Chaque communauté de pratique formalisera ainsi une demande d’équipement qui lui est propre. Dans un contexte de délabrement démocratique, elles ont compris qu’elles pouvaient constituer le socle de micro-bases électorales pouvant potentiellement mobiliser un nombre significatif de citoyens sur des projets jugés « tangibles », « concrets », « matériels ». Ainsi, si les ressources financières (et, dans une moindre mesure, foncières) pouvaient le permettre, on pourrait facilement imaginer des territoires remplis d’équipements spécifiques permettant à chaque communauté de s’épanouir dans ses pratiques.
« Les milliers de piscines municipales construites dans les années 1970 sont déjà caduques et, la plupart du temps, il est impossible de les faire “transitionner”. »
Or, nos enquêtes sont assez claires : les infrastructures sportives résultent, la plupart du temps, d’erreurs de conception ou de design. D’abord, nous l’avons dit, parce qu’elles sont systématiquement les infrastructures les plus problématiques d’un point de vue écologique. Mais aussi parce que leur durée de vie est étonnamment courte. Les milliers de piscines municipales construites dans les années 1970 sont déjà caduques et la plupart du temps il est impossible de les faire « transitionner ». Leur conception est remplie d’irréversibilités (techniques, énergétiques, architecturales) qui rendent très difficile, voire irrationnel (d’un point de vue financier mais aussi architectural) le chantier de leur verdissement. Leur maintenance est coûteuse (entretien des bâtiments, des pelouses, des abords, nettoyage des tribunes, systèmes de chauffage, électricité, etc.), ce qui explique aussi pourquoi nombre de ces infrastructures tombe en ruine et nécessite des actualisations financières massives.
Par ailleurs, elles souffrent d’un manque d’évaluation critique de leurs fonctionnalités et de leurs usages réels. La plupart du temps, un stade est vide, et pourtant il faut le maintenir prêt à l’emploi en permanence. La nuit, la piscine municipale doit continuer à maintenir l’eau chaude pour éviter de devoir, jour après jour, relancer les systèmes de chauffage. Bien évidemment, les pouvoirs locaux essayent d’optimiser leur utilisation : optimisation de la planification, optimisation des équipements énergétiques, isolation, etc. Mais toutes ces optimisations ne permettent pas de rediriger pleinement les politiques sportives pour répondre aux limites planétaires.
« Lorsqu’on construit un stade ou un gymnase, on renonce à d’autres politiques publiques susceptibles de générer une utilité sociale fondamentale face aux enjeux écologiques actuels ou à venir. »
Face à ces impasses, certains territoires ont compris la nécessité de bâtir une vraie stratégie sportive à l’heure de l’Anthropocène. C’est dans ce contexte que nous avons initié un programme de recherche permettant à ces territoires de concevoir des scénarios de redirection écologique de leurs politiques sportives. Le socle fondamental pour être en mesure de rediriger une politique sportive en Anthropocène consiste d’abord à disposer d’une lecture précise de la performance sociale et écologique des équipements sportifs. Cela implique la conception et le recours à des métriques permettant de lier les performances d’usage d’un équipement à sa matérialité écologique ou encore à son coût d’opportunité au regard de l’Anthropocène. Il faut ainsi savoir mesurer l’écart entre l’amortissement écologique et l’amortissement comptable d’un équipement pour montrer à quel point s’observe un décalage entre la durée de vie d’un équipement sportif et les ressources écologiques, énergétiques, matérielles, techniques qui ont été mobilisées pour le bâtir.
Au-delà, il faut aussi clairement décortiquer tous les coûts écologiques, humains, financiers de la maintenance d’un équipement, puis rapporter ces coûts aux usages réels d’une infrastructure. Il est également nécessaire de penser un coût d’opportunité en Anthropocène. Celui-ci consiste à calculer ce que l’on perd en termes d’investissement pour l’habitabilité de nos milieux de vie lorsqu’on immobilise du foncier ou que l’on génère des consommations de flux afin de maintenir des infrastructures sportives. Lorsqu’on décide de construire un stade ou un gymnase, on renonce à d’autres politiques publiques susceptibles pourtant de générer un rendement ou une utilité sociale fondamentale face aux enjeux climatiques et écologiques actuels ou à venir. La conception de ces métriques est essentielle pour donner une place centrale au terrestre, aux non-humains et aux milieux du point de vue du pilotage des organisations publiques. Mais surtout, c’est grâce à ces métriques que l’on pourra bâtir une nouvelle science de l’arbitrage public alignée sur l’Anthropocène. •
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