Le temps séquestré

Le cimetière des temps détruits

Il en va du temps comme des langues : il existe un temps « natal », apparemment naturel, comme allant de soi. Pourtant, un citoyen occidental contemporain n’aura pas de peine à reconnaître « son » temps autour de la planète, tant celui-ci a partout imposé, par les armes et par le Livre, ses repères et son récit. La conception historique d’une « flèche du temps » n’en est pas moins une exception dans l’histoire des sociétés humaines.

« Quelle heure est-il ? » n’est pas une question anodine. « Quel jour sommes-nous ? » ne l’est pas davantage. L’attitude adoptée face à l’écoulement du temps, aussi quotidienne et banale semble-t-elle, ne dépend pas d’une quelconque vérité révélée en tous lieux, sous toutes les latitudes. Elle consiste au contraire en un apprentissage, un acquis largement inconscient, qui se révèle construit et ancré dans un terreau culturel, disposant de son référentiel, de ses repères, en un mot, de son calendrier. D’ailleurs, sommes-nous si sûrs que le temps s’écoule bel et bien ?

Dans un livre paru en 1984, l’anthropologue américain Edward T. Hall s’est penché sur les diverses conceptions du temps en vigueur sur la planète, en interrogeant notamment certains peuples dits « premiers » ou indigènes. Après avoir étudié les Hopis, peuple amérindien vivant dans le désert de l’Arizona, aux États-Unis, Edward T. Hall écrit dans La Danse de la vie. Temps culturel, temps vécu : « Fondamentalement, on peut distinguer dans le monde deux types de cultures : pour les unes, le temps guérit, et pour les autres, au contraire, il ne guérit pas. […] Les Blancs appartiennent au premier, les Hopis au second. » Un temps qui guérit, c’est un temps qui passe, efface, s’écoule d’un avant vers un après. Plus loin dans son ouvrage, l’anthropologue lie ces ­différences d’appréciation du temps à la structure des langues,...

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