A compléter

En réponse à Fillon, il se présente à la présidentielle #JeSuisAutiste

Le comédien et romancier engagé Hugo Horiot a surpris la twittosphère ce lundi 6 mars. Désormais, il est le premier autiste à se présenter à la candidature de l'élection présidentielle française. Il a déjà une directrice de campagne, et lance aujourd'hui un appel à parrainages. C'est sur Twitter et dans Socialter qu'il a choisi de faire sa déclaration.

Son engagement politique pour la reconnaissance et l'intégration des autistes en France a toujours accompagné sa carrière artistique. Pourtant, la ferveur dont il fait preuve sur les réseaux sociaux ces dernières heures est née d’un autre combat. Affronter l’ignorance du grand public est devenu pour lui "une urgence" après la sur-médiatisation de nombreux propos "insultants" les autistes. En cause, l'intervention de François Fillon lors du JT de 20h sur France 2 dimanche soir a motivé sa candidature. Devant plus de 7 millions de téléspectateurs, le candidat LR a répété plusieurs fois "Je ne suis pas autiste", en gage de sérieux et de lucidité; "je vois les difficultés", rajoutait-il dans la foulée. Dans l'interview, François Fillon justifiait le maintien de sa candidature, fragilisée par des affaires judiciaires depuis le début du Pénélope Gate. 

Pour Hugo Horiot, ce buzz médiatique "est avant tout le symptôme d'une profonde ignorance" sur le sujet. Car ce n'est pas la première fois que l'expression est utilisée par la classe politique. En 2008 par exemple, le Parti Socialiste parlait de "l'autisme" du gouvernement de... François Fillon, pour dire qu'il s'obstinait à nier ses responsabilités. 
"Ce n'est pas pour faire la police des mots, reprend le romancier, mais l'autisme est baffoué, relégué à ce qu'on appelle à tort une maladie." Certains titres de la presse en ligne lundi laissaient déjà transparaître l'ampleur de son combat. 

Que l'expression soit jugée "maladroite" ou plus sévèrement "dégradante", la reprise de l’extrait télévisé a inspiré dans la journée de lundi une vague de contestations partie de la toile. Hugo Horiot était l'un des premiers à inonder le web du virulent #JeSuisAutiste. "C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, s’insurge-t-il. Déjà qu’ils passent leur temps à nous faire la morale alors qu’ils n’ont aucune éthique, en plus ils emploient l’autisme uniquement comme une insulte!".  


 

Généraliser le comportement du candidat LR à tous les autres est un peu hâtif, mais au téléphone, l’émotion est forte. On est à quelques heures de sa grande décision. Et ce n’est pas rien; Hugo Horiot a choisi d’incarner le changement de discours et de politique qu’il essayait d’inspirer auparavant par ses écrits. Dans une tribune publiée dans Socialter en 2014, il questionnait déjà "le manque de courage politique" face aux réformes à engager sur le terrain de l’éducation. Aujourd’hui, ce trentenaire ne semble pas en manquer. 


Le candidat de la "neuro-diversité" 

"La France est un des pays avec le plus faible taux de scolarisation des enfants autistes, s’alarme-t-il, et aucun candidat ne prévoit une quelconque mesure pour faire face au problème!". D'après l'UNICEF, plus de 80% des enfants autistes ne seraient toujours pas scolarisés en France. Cela concernerait plus de 20 000 familles. Le pays des Droits de l'Homme en est d'ailleurs à sa 5eme condamnation du Conseil de l'Europe pour discrimination à l’égard des enfants autistes, défaut de scolarisation et de formation professionnelle.

Le discours du candidat Horiot dépasse la critique politique: "C'est un problème d'état d'esprit, affirme-t-il avec conviction. Je souhaite me présenter aux élections pour faire comprendre aux français que les autistes sont aptes à mettre leurs compétences au service de la société."
A l'étranger, il n'est pas rare que l'autisme soit perçu comme une richesse. C'est le point de vue de l'armée israelienne qui parle de ses recrues autistes comme d'un "atout". Il est aussi partagé par de nombreux employeurs dans la très fertile Sillicon Valley américaine. Pour Hugo Horiot, la conclusion est toute autre dans l'hexagone: "en France nos qualités sont au mieux ignorées, au pire, rejettées par la normalité". 

L'homme est déterminé, il sera "le candidat de la neuro-diversité". Dans l’improvisation du moment, Hugo Horiot signe sur Twitter une ode "au politiquement incorrect", premier jet d’un projet de société:

                


« Celui qui contrôle les médias contrôle les esprits. » 

Cette phrase, empruntée à l’artiste Jim Morrison et glissée sur son site personnel, résonne aujourd’hui comme la logique de son nouvel engagement. Et si les erreurs de François Fillon permettaient à d'autres d'enfin placer au cœur du débat public les enjeux, souvent relayés en arrière-plan des manifestations contre les réformes scolaires, de santé et d’éducation liés à l’autisme ? 

La candidature d’Hugo Horiot offrira peut être quelques jours de plus aux gazouillis médiatiques. Et après? Le romancier est soutenu par l'association SOS Autisme et le Comité Consultatif National des Autistes de France, dont il tient la vice-présidence. Mais le bruit risque d'être étouffé s'il n'obtient pas les 500 signatures d’élus d’ici le 17 mars, date de clôture des dépôts de candidature. Qu’importe, c’est maintenant que les projecteurs sont braqués. Et le romancier ne manque pas une occasion de battre la campagne:

- "Les journalistes hésitent sur les formules appropriées à employer dans leurs articles. Dois-je écrire que vous êtes autiste ou que vous êtes atteint d’autisme?".

La réponse de l’interrogé est cinglante, et instructive:

- "C’est bien ça le problème! Un autiste n'est handicapé que par le regard que les autres portent sur lui, par l'incompréhension. On n'est pas ‘atteint d’autisme’, on est atteint de l’ignorance des autres." 

 

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