Salomé Berlioux

« Dans les campagnes, la crise sanitaire est une crise dans la crise »

Télétravail, fermeture de commerces, infrastructures et services dégradés, décrochage scolaire, manque de lieux de sociabilité… Et si, avec le confinement, la France des urbains avait découvert le quotidien de ses campagnes, qui affrontent toujours plus de fractures et de crises ? Pourtant, le « monde d’après » continue de s’écrire pour les villes. Dans l’ouvrage Nos campagnes suspendues (Éditions de l’Observatoire, 2020), Salomé Berlioux a recueilli les témoignages de jeunes ruraux pour qui l’horizon est depuis longtemps bouché.

Dans votre livre, vous tordez le cou à deux idées reçues : le retour à la campagne n’est pas nouveau et il n’est pas certain que cette ­tendance soit accentuée par la crise sanitaire que nous traversons.

Je pense qu’il faut faire attention à tout ce qui relève de l’image d’Épinal de la vie à la campagne. Lors du premier confinement, on a surtout entendu le point de vue de familles qui étaient allées se confiner à ­Aix-en­-Provence, sur l’île de Ré ou dans le Perche… Bref, dans la France des résidences secondaires. Ce point de vue est plutôt celui des CSP+ et des intellectuels qui avaient la chance de pouvoir se confiner hors des grandes métropoles, mais ce n’est qu’une partie de la réalité de la vie « en province », comme disent les Parisiens. La France des résidences secondaires, ce n’est pas la France périphérique telle que la connaissent ceux qui y vivent au quotidien. Dans la Creuse, les ­Vosges, l’Ain ou l’Allier, on habite ces ­territoires 365 jours par an ; on n’y vit pas ­seulement au printemps ou en été. 

Dire cela, ce n’est évidemment pas critiquer les urbains qui ont pu vivre le premier confinement dans leur résidence secondaire. J’insiste ­là-dessus parce que souvent, quand on écrit sur la France des territoires, on a tendance à cliver, à approfondir les fractures entre Paris et la province qu’il faudrait au contraire chercher à réparer. Il est nécessaire de le faire, me ­semble-t-il, sans misérabilisme, mais aussi sans ­naïveté. La...

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