Numéro 53

Numéro 53

Punir les écocidaires

Déforestation, bétonisation, pollutions chimiques et atmosphériques... Autant de désastres écologiques « ordinaires », conséquences d’une logique d’accumulation qui exploite les hommes et la nature : le capitalisme. À l’exception de quelques affaires scandaleuses et d’acteurs infâmes appelés à comparaître – l’armateur véreux, la multinationale vorace, le politique corrompu, le lobby cynique –, la loi penche indubitablement du côté de la destruction du monde. Elle laisse les coudées franches à une multitude d’autres acteurs plus présentables, autorisés à exploiter tout ce que la planète compte de ressources et à faire primer le profit sur la santé publique. N’est-il pas temps de refonder l’ordre pénal international pour enfin punir ces prédateurs écocidaires ? De retourner certaines lois contre eux ? De se former aux bases du droit ou de mieux manier celui existant pour faire obstacle à leur monde ?

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Frais de port
France métropolitaine
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Reste du monde + TOM
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6,90

COMPOSE TON ___________

Compose ton philosophe écomoderniste

Sous la forme d’un texte à trous, le lecteur est invité à se glisser dans la peau d’un personnage dont les éléments de discours nous ont semblé particulièrement savoureux. Dans ce numéro : le philosophe écomoderniste

DOSSIER

Vers un nouvel ordre pénal international ?

Face à l’échec du droit international à réprimer efficacement et largement la criminalité environnementale, un bouleversement de l’ordre pénal semble incontournable pour que la peur change de camp. Parmi les propositions avancées, l’inscription du crime d’écocide aux statuts de la Cour pénale internationale (CPI) semble la piste la plus prometteuse. Mais encore faut-il qu’une volonté politique forte émerge au sein de nations frileuses à l’idée de faire passer leurs intérêts propres après l’impératif de préservation de la biosphère.

Peut-on saboter au nom de la légitime défense ?

Face à l’écocide planétaire, l’écosabotage pourrait-il finir par devenir juridiquement recevable ? Pourrait-il être l’ultime recours pour changer au forceps la jurisprudence ? Convaincre un juge par un tel argumentaire est une gageure, mais l’histoire montre qu’une radicalité légitime peut précéder, voire engendrer, une nouvelle légalité.

70 ans d’écocides

Catastrophes nucléaires, rejets de pesticides, marées noires… La seconde moitié du xxe siècle abonde d’« accidents » avec leur cortège de coupables tout désignés – multinationales voraces, politiques décadents, ouvriers négligents et autres États corrompus. Un responsable ultime n’est, cependant, jamais mentionné : le capitalisme industriel – mode de domination et d’exploitation de la nature. Quelques innovations légales tentent néanmoins, lorsque certains acteurs dépassent vraiment les bornes et que le scandale prend trop d’ampleur, de remettre un peu d’ordre dans le saccage des écosystèmes.

Manuel d'offensive juridique

Que faire face à l’installation inopinée d’un projet écocidaire à côté de chez vous ? Pour commencer : réagir vite, s’armer de patience et… bien s’entourer. Lorsque la locomotive de la bétonisation est lancée à pleine vitesse, le droit peut se révéler un allié précieux pour gagner du temps et rattraper les tours d’avance que les promoteurs d’hypermarchés et d’entrepôts logistiques ont pris sur les riverains. Jusqu’à, parfois, obtenir l’annulation du projet. Petit cas pratique.

Plaider pour l'environnement

L’association Wild Legal forme chaque année une promotion d’étudiants en droit pour les préparer à défendre, demain, l’environnement dans les tribunaux.

La faute aux victimes ?

L’argumentaire est bien rodé : devant les tribunaux, les industriels qui contaminent l’environnement et l’État complice n’hésitent pas à reporter le blâme sur les imprudents qui s’exposent aux substances nocives. Une façon de se dédouaner, tout en détournant l’attention des racines des désastres écologiques et sanitaires.

L'ENTRETIEN FLEUVE

Anna L.Tsing : « Traduire nos différences en objectifs communs »

« Une grande histoire importe moins qu’une chance d’ouvrir de nouvelles portes » : cette phrase prononcée par Anna L. Tsing lors d’une conférence sur l’anthropocène* en 2015 résume à elle seule la pensée de cette anthropologue américaine. Arpentant les forêts d’Indonésie et de l’Oregon, elle a toujours choisi de s’écarter des grands récits surplombants qui décrivent habituellement le « capitalisme » ou l’« anthropocène ». Face à leurs conséquences désastreuses, ses écrits et ses explorations résonnent comme une invitation à creuser entre les lignes, là où les articulations et les interstices nous donnent l’opportunité de créer des résistances insoupçonnées.

GRAND REPORTAGE

Au Liban, le retour aux semences paysannes en réponse à la crise du blé

Le Proche-Orient et l’Afrique du Nord – régions fortement dépendantes des importations de céréales et surexposées à l’insécurité alimentaire – sont les victimes collatérales de la guerre qui oppose depuis février 2022 deux pays « greniers » : l’Ukraine et la Russie. En particulier le Liban, qui a sombré depuis l’explosion du port de Beyrouth en 2020 dans l’une des pires crises de son histoire. Face à toutes ces plaies qui s’abattent sur le pays du Cèdre et à l’impéritie des gouvernants, de jeunes agriculteurs tentent de reprendre en main le destin alimentaire de leur nation et de renouer avec une production agricole bio, locale et autonome.

ENQUÊTE

Big Tech, Bad Bank

Non comptabilisés dans les bilans carbone des entreprises, les actifs financiers qu’elles possèdent peuvent avoir un impact très négatif sur le climat. Pointés du doigt, les acteurs qui gèrent cette épargne continuent d’investir dans les énergies fossiles, malgré le risque d’une nouvelle crise financière.

TROISIÈME NATURE

L’ailante, espèce rudérale rudoyée

Il s’acharne à pousser sur des sites bétonnés, secs et pollués. Autrefois choyé dans les jardins du Roi-Soleil, puis cultivé pour son ver à soie, l’ailante est aujourd’hui classé « espèce exotique envahissante ». Une catégorisation idéologique, dénoncent écologues et artistes, qui plaident pour appréhender végétaux et animaux « invasifs » comme de précieux bio-indicateurs.

PLAT DE RÉSISTANCE

Petits sabotages du quotidien

Dégonfler les pneus des SUV, ouvrir les paquets de sucre dans les supermarchés, forcer les panneaux publicitaires des Abribus, recouvrir le QR code des trottinettes en libre service… Il existe tout un panel de sabotages accessibles et peu risqués qui intègrent au fil du temps le corpus d’actions de certains activistes. Si leur impact est difficilement quantifiable, ces « petits gestes du quotidien », trop radicaux pour certains et pas assez pour d’autres, se fraient un chemin dans l’imaginaire militant de ceux qui prônent la diversité des tactiques.

L’EFFET PARE-BRISE

L'angoisse de l'oubli qui rôde

Docteur en océanographie et plongeur professionnel, François Sarano est un infatigable défenseur de l’océan et de ses habitants. Fasciné par la beauté des fonds marins, dont il déplore la dégradation, il assiste impuissant à la lente disparition des requins. Tout en gardant chevillé au corps ce constat : sous l’eau, il suffit de peu pour que la vie reprenne

RESSOURCES CRITIQUES

Un monde accro au sucre

Produit depuis le premier millénaire avant notre ère, le sucre est devenu un ingrédient incontournable à partir du xviiie siècle en Europe. Alors que sa consommation tend à décliner sur le Vieux Continent, il est toujours plus prisé dans les pays asiatiques. Or sa production se trouve de plus en plus souvent confrontée à des phénomènes climatiques extrêmes ou à la prolifération de nuisibles.

CHRONIQUES

François Begaudeau : Dialectique de l’humain

François Bégaudeau est écrivain, critique littéraire, scénariste et réalisateur. Auteur de plusieurs romans dont La Blessure, la vraie (Verticales, 2011) et En guerre (Verticales, 2018), il a récemment signé l’essai Notre joie (Pauvert, septembre 2021). Il tient une chronique régulière pour Socialter et livre deux fois par mois un podcast de critique de cinéma, La gêne occasionnée.

Salomé Saqué : L’illusion de la neutralité

Après des débuts au Monde diplomatique et à France 24, Salomé Saqué acquiert une certaine notoriété pour sa couverture du mouvement des Gilets jaunes pour le média en ligne Le Vent se lève (LVSL). Spécialisée dans les questions économiques, elle rejoint Blast, le site d’information lancé en 2021 par Denis Robert. Elle est également chroniqueuse régulière dans l’émission «28 minutes» sur Arte et «Ça vous regarde» sur LCP. Elle tient cette chronique pour Socialter.

À LA SAUCE ALTER

Énergie osmotique : sel à venir

La première centrale osmotique française pourrait voir le jour en Camargue. Ce procédé consiste à produire de l’électricité à partir d’un mélange d’eau douce et d’eau salée. Une technologie ancienne aux nombreuses promesses, mais dont l’exploitation reste incertaine.

AU LABO

Xénogreffes : même pas porc !

Les cochons génétiquement modifiés pourraient devenir le prochain vivier de « donneurs » d’organes. Mais plusieurs médecins mettent en garde : les xénogreffes risquent de devenir une future usine à pandémies.