Numéro 47
Version numérique

Numéro 47

Êtes-vous écoféministe ?

Après avoir été occulté pendant de nombreuses années, l’écoféminisme fait son retour en France. Née dans les années 1970 sous la plume de Françoise d’Eaubonne, cette pensée critique affirme que la destruction de la planète et l’exploitation des femmes relèvent d’une même logique. Une fois énoncé ce postulat fondateur, une épaisse jungle se découvre alors : celle d’un mouvement pluriel, riche de luttes antimilitaristes et antinucléaires, mêlant perspectives utopiques et modes d’action radicaux, savoirs oubliés et spiritualités alternatives. Un corpus théorique foisonnant, tentant de mettre au jour tout ce que le monde moderne – à travers ses différents systèmes oppressifs (patriarcat, capitalisme, colonialisme, spécisme, technicisme) – a voulu réduire au silence. Dans ce dossier, Socialter propose de dévoiler les différentes branches, figures intellectuelles, collectifs et mouvements de l’écoféminisme.

Numéro en rupture de stock, disponible en version numérique uniquement
Version

DOSSIER

Écologie + Féminisme ≠ écoféminisme

Les sorcières sont de retour ! Figures de proue de l’écoféminisme, on les retrouve aujourd’hui jusque dans les discours et programmes de personnalités politiques issues de la gauche institutionnelle. Conversion ou récupération ?

L'écoféminisme expliqué à mes parents

Pour Maman, le féminisme s’est arrêté à Simone de Beauvoir. Quant à Papa, il est tout simplement inconsolable depuis la défaite de la France à l’Euro de football. Autant dire que parler avec eux d’écoféminisme peut devenir un sujet explosif.

Françoise d'Eaubonne : L'amazone

« Non pas le “matriarcat” certes, ou le “pouvoir aux femmes”, mais la destruction du pouvoir par les femmes. »

Vandana Shiva : Ghandi des graines

« Les femmes paysannes se sont émancipées, défiant ouvertement [...] les hommes de la région qui avaient été colonisés cognitivement, économiquement et politiquement. »

Starhawk : L'enchanteresse

« M’identifier comme païenne, féministe, sorcière et anarchiste peut être alarmant pour beaucoup mais cela m’empêche au moins de sombrer dans l’ennui respectable de l’âge mûr. ».

Silvia Federici : Sorcière matérialiste

« Les sorcières n’étaient pas seulement des victimes. Elles étaient des femmes qui résistaient à leur paupérisation et à leur exclusion sociale. »

Carolyn Merchant : L'éthicienne

« À la fin du XVIIe siècle, le noyau de principes féminins qui a subtilement guidé pendant des siècles le comportement envers la terre a cédé la place à une nouvelle éthique de l’exploitation. »

A-t-on besoin de la déesse ?

Accusée d’être dépolitisante ou raillée pour ses tendances ésotériques, la dimension spirituelle de l’écoféminisme est souvent l’objet de perplexité. Pour Jeanne Burgart Goutal, philosophe et autrice d’Être écoféministe (L’échappée, 2020), elle est pourtant cohérente avec les aspirations écoféministes: fonder une éthique non anthropocentrée.

Nées dans la lutte

Nébuleuse hétérogène, l’écoféminisme s’est construit sur le terrain autant que dans les livres. Il y a près d’un demi-siècle, des groupes de femmes se sont constitués en Asie, en Amérique ou en Europe, donnant naissance au mouvement avant même qu’il soit étiqueté «écoféministe». Elles ont enlacé des arbres, se sont armées de déguisements ou de marionnettes et ont donné à leurs protestations des formes et des contenus inédits. Retour en images sur trois de ces combats fondateurs.

Vivre l'écoféminisme : modes d'action

Il y a celles qui recensent, racontent et montrent. Celles qui luttent, occupent et manifestent. Et puis celles qui ont pris la route de l’utopie et fait de l’écoféminisme un mode de vie en marge de la société.

L'ENTRETIEN FLEUVE

Andreas Malm : « Il faut nationaliser total »

Face à l’ampleur et la multiplicité des batailles écologiques à mener, le premier réflexe est de se sentir écrasé. Contre cette paralysie collective qui profite aux gardiens du temple capitaliste et nous précipite, chaque jour un peu plus, vers le chaos climatique, l’essayiste et militant suédois Andreas Malm appelle à un «léninisme écologique». Autrement dit : profiter des crises en cours pour s’attaquer, par des objectifs simples et concrets, quitte à recourir au sabotage, à ce qui maintient le business as usual en place. Entretien.

GRAND REPORTAGE

La mer qu'on voit ronger

À Wissant, sur la Côte d’Opale, l’érosion est telle depuis des décennies que la mer menace à présent les habitations. Le problème, amplifié par le réchauffement climatique, est désormais une préoccupation majeure. Mais politiques, associations et chercheurs sont divisés entre solutions douces ou fortifications, alors que certains commencent à évoquer une piste que tous les habitants redoutent : le déplacement des maisons face à l’inéluctable avancée des eaux.

ENQUÊTE

The green no deal

Après les annonces ambitieuses, passée la vague d’espoir, à quoi ressemble concrètement la politique écologique de la nouvelle administration américaine? S’ils survivent à leur passage au Congrès, les grands projets de Joe Biden devraient se résumer à un programme d’investissements publics afin de stimuler une hypothétique croissance verte. Voiture individuelle et consumérisme resteront au cœur d’un American way of life définitivement non négociable.

PLAT DE RÉSISTANCE

Legal teams : quand la défense contre-attaque

Face à la répression juridique des militants, qu’ils soient gilets jaunes ou activistes antinucléaires, les coordinations antirépression et leurs legal teams s’approprient les enjeux de la défense et font du prétoire un lieu de lutte collective et politique.

AU LABO

Glyphosate : un débat empoisonné ?

À l’heure où le glyphosate, l’herbicide le plus utilisé au monde, est en phase de réévaluation pour être de nouveau autorisé en 2022, une récente expertise collective menée par l’Inserm a réaffirmé la présomption forte d’un lien entre l’exposition au glyphosate et certaines pathologies. Mais pourquoi le débat en est-il encore là?

RESSOURCES CRITIQUES

Lithium, ruée vers « l'or blanc »

Téléphones mobiles, ordinateurs portables et, aujourd’hui, voitures électriques… l’électrification de la mobilité s’est traduite par une ruée vers le lithium, matériau qui a bouleversé l’industrie des batteries il y a trente ans. La maîtrise de l’extraction de cet «or blanc» et de sa transformation revêt une importance stratégique. Quitte, jusqu’ici, à occulter totalement les désastres écologiques et sociaux liés à sa production.

LES DÉTERRÉS

Nicholas Georgescu-Roegen : L'urgence bioéconomique

Le théoricien de la bioéconomie, Nicholas Georgescu-Roegen (1906-1994), a construit une œuvre visionnaire qui, s’appuyant sur l’entropie, a confronté le mythe d’une croissance infinie à son irréalité physique.

CHRONIQUES

François Begaudeau : Pourquoi je ne consomme pas

François Bégaudeau est écrivain, critique littéraire, scénariste et réalisateur. Auteur de plusieurs romans dont La Blessure, la vraie (Verticales, 2011) et En guerre (Verticales, 2018), il a récemment signé l’essai Histoire de ta bêtise (Pauvert, 2019) où il interpelle la bourgeoisie. Il tient une chronique régulière pour Socialter et livre deux fois par mois un podcast de critique de cinéma, La gêne occasionnée.

CHRONIQUES

Juliette Rousseau : Pour un autre universalisme

Juliette Rousseau est journaliste, autrice et éditrice aux Éditions du Commun. Militante de terrain, elle a coordonné de multiples événements politiques internationaux (contre-G8, contre-G20, etc.) et s’est attachée à questionner les pratiques d’organisation militante dans l’ouvrage Lutter ensemble. Pour de nouvelles complicités politiques, paru aux éditions Cambourakis en 2018. Elle tient cette chronique pour Socialter.

BLEU BLANC VERT - LA CHRONIQUE PRÉSIDENTIELLE

Jadot est-il écolo ?

À chaque numéro, Socialter décrypte un enjeu écologique lié à la présidentielle de 2022 pour révéler les clivages et affrontements idéologiques qui se jouent derrière le verdissement des programmes des candidats. Dans ce numéro, nous nous attardons sur la question des prérequis pour une candidature réellement écologiste.

L'IDÉE DONT VOUS ÊTES LE HÉROS

La primaire, pour ou contre ?

Depuis 2011, année où le Parti socialiste a inauguré l’exercice, les primaires ouvertes resurgissent à chaque échéance présidentielle en France. À quelques mois du scrutin de mai 2022, déjà deux consultations devraient se tenir (la primaire écologiste et la « primaire populaire »), tandis que les deux (ex-)grands partis français, le Parti socialiste et Les Républicains, hésitent encore à organiser la leur. À quoi sert vraiment cette procédure de désignation ?

CARNETS DE CRISES

Quelle est la meilleure flaque du monde ?

Un lieu particulier et des particules de vécu qui s’y agrègent. Des sons, des odeurs, des histoires... Le philosophe Jean-Philippe Pierron, auteur de Je est un nous (Actes Sud, 2021), rappelle la puissance de l’idée d’habiter, de se sentir lié à une ville, un quartier, une rue, un détail, un interstice. Telle la flaque d’eau, élément urbain inattendu, dont il invite à faire la «géopoétique» comme un premier pas pour réparer le rapport sensible qui nous lie à nos milieux de vie.

J'HABITE...

J'habite... avec une vieille dame qui n'est pas ma grand mère

Elles ont plus de 60 ans d’écart mais partagent le même toit. Comme Johanna, Mady et Marie-Claude, des milliers de Français expérimentent la cohabitation intergénérationnelle, en dehors des schémas familiaux. Un pari fort, mais qui peine à s’imposer.

EN RÉPONSE À...

En réponse aux résiliothérapeutes et leur métaphysique du malheur

Une mission parlementaire sur la résilience nationale vient d’être créée, préfigurant peut-être un ministère de la Résilience, preuve que cette nouvelle sémantique séduit, jusqu’à prendre racine dans les politiques territoriales comme dans les programmes politiques. Face aux résiliothérapeutes, le chercheur Thierry Ribault, auteur de Contre la résilience. À Fukushima et ailleurs (L’échappée, 2021), dénonce ce qu’il identifie comme une technologie de consentement à vivre dans un monde aux conditions de vie dégradée, un nouveau récit sans Histoire.

CHANGER DE VIE... ET APRÈS ?

Mauricio Garcia Pereira : «Je voulais rendre la baffe à visage découvert»

Après sept ans comme employé à l’abattoir municipal de Limoges, Mauricio Garcia Pereira a publié en 2016 des vidéos volées aux côtés de L214 dans lesquelles il révèle au grand public la façon dont sont traitées les vaches sur le point de mettre bas. Derrière les buzz médiatiques de l’association se cachent parfois des ouvriers qui, comme lui, ont décidé de courir tous les risques pour devenir lanceurs d’alerte.