Au pied de Firmihin, quelques huttes de pierres gardent la dernière forêt d’arbres dragons, qui s’étend sur une quinzaine de kilomètres carrés. C’est dans cette immensité isolée, s’élevant jusqu’à 1 000 mètres d’altitude, cernée par d’impressionnants canyons rouges et d’imposantes falaises, qu’une poignée de villageois vit toute l’année. De petits moutons bêlent à l’entrée d’une cahute protégée par une barrière de branches sèches. Une vieille femme, voile noir sur le visage ramené par sa main gauche, fait entrer les bêtes. Mitkel Amer ne sait pas vraiment quand elle est née, mais une chose est sûre : les arbres dragons étaient là avant sa naissance et celle de ses ancêtres. D’un feuillage piquant en forme de champignon, les branches tentaculaires montées sur un épais tronc à la sève rouge – ou sang de dragon – longtemps utilisée en pharmacologie et comme colorant, le Dracaena cinnabari est considéré comme une plante fossile. Si aujourd’hui il n’en existe qu’à Socotra et quelques espèces différentes sur les îles Canaries ou à Oman, l’arbre peuplait autrefois les forêts d’Europe et d’Amérique du Nord il y a… vingt millions d’années. Sa croissance est extrêmement lente. Même s’il est difficile de déterminer leur âge du fait de l’absence d’anneaux concentriques sur leur souche, les scientifiques estiment qu’il faut plusieurs centaines d’années pour qu’un Dracaena parvienne à l’âge adulte. Les arbres auraient ainsi entre 500 et 800 ans. Les plus anciens...