Entretien

Ariane Lavrilleux : « La France n’a aucun moyen de contrôle sur les armes vendues et leur destination finale »

Illustration : Elie Huault

L’industrie militaire française se porte bien. Avec plus de 21,6 milliards d’euros de commandes en 2024, la France est le deuxième pays exportateur d’armes du monde. Et, malgré les dénégations du gouvernement, des informations montrent que le matériel français contribue aux attaques à l’encontre de civils dans des zones de conflits (Israël, Yémen, Ukraine) ou participe à l’organisation de régimes autoritaires comme en Chine. Difficile pourtant de savoir avec précision comment circulent ces armes et à quelles fins elles sont utilisées en raison d’un manque crucial de transparence. Si ce n’était grâce aux enquêtes de certains médias tenaces. Rencontre avec Ariane Lavrilleux, journaliste d’investigation et rédactrice en chef adjointe de Disclose, dont les articles sur les ventes d’armes françaises ont créé des remous très politiques.

Pouvez-vous tout d’abord revenir sur les termes consacrés à ce secteur ? On parle d’industrie militaire, de secteur de la défense, d’armement, comment s’y retrouver ?

Les autorités et les professionnels aiment bien utiliser des termes qui renforcent l’opacité de ce secteur, et qui lui donnent parfois beaucoup plus d’importance qu’il n’en a en réalité d’un point de vue industriel. 

L’expression qui revient est « BITD » pour « base industrielle et technologique de défense », et qui regroupe toutes les entreprises qui travaillent pour ce secteur. Officiellement, ce dernier totalise 220 000 emplois directs et indirects, et 4 500 entreprises. Les ministres des armées aiment présenter ce secteur comme très important et dynamique économiquement, or son poids reste limité : l’industrie en tout compte 3,2 millions de salariés.

Entretien issu de notre n°72 « L'industrie de la destruction » disponible en kiosque, librairie, à la commande et sur abonnement.

Surtout, en France, l’industrie de la défense est dominée par huit gros groupes : Airbus, Dassault Aviation, Naval Group, Thales, MBDA, Safran, Nexter (aujourd’hui KDNS, NDLR) Arquus, qui représentent 80 % des ventes de la défense à des clients étrangers. L’État français est actionnaire de certains et, pour la plupart, un important commanditaire. C’est aussi lui qui autorise leurs exportations et leurs licences. Ces grosses entreprises font...

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NUMÉRO 72 : OCTOBRE-NOVEMBRE 2025:
L'industrie de la destruction : comment les guerres accélèrent la catastrophe écologique
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